Festival Rock 70's de Charmont 22/05/2010
par Y. Philippot-Degand / Photos : JEFF LESCENE
L'affiche promettait, des potes nous attendaient de pied ferme (près de la buvette?)
et c'est donc avec plaisir et le concours d'une météo clémente, que nous nous sommes lancés dans le long trajet nous séparant de la Champagne. En arrivant, toujours sous un beau soleil, nous eûmes la surprise de percevoir à la fois des notes électriques provenant de la salle, visiblement la fin d'une balance, et quelques notes familières mais moins électriques :
Natchez avait déjà commencé son Festival sans perdre une minute!
Bon, puisqu'on y est, parlons donc de nos Indiens!
On savait déjà le quatuor champenois parfaitement capable de s'accommoder de guitares sèches, la confirmation est venue sans tarder. A chaque intermède de ce Festival 2010, le groupe a pris avec brio le relais de la scène intérieure et nous a distillé avec sa maîtrise habituelle quelques uns de ses classiques, originaux et reprises, avec, cerise sur le gâteau, un "Freebird" d'anthologie imparablement paraphé par un Manu en grande forme, se chargeant à la fois des parties de Rossington (slide) et Collins (solo final). Du boulot plus que soigné, doublé d'un vrai succès populaire, bravo!
Comment, il faut aussi dire du mal? Ben zut! Natchez en acoustique, c'était top… Il est exigeant, le rédacteur en chef! Alors, monsieur le Divisionnaire, disons que Dédé, bassiste de son état (je dénonce les petits camarades!), a honteusement profité de la faiblesse sonore temporaire de ses guitaristes pour arroser un tantinet, surtout vers la fin de soirée, en loucedédé, et montrer la qualité de son jeu. Mais oui, Dédé, tu étais là! Et on sait que c'est les frangins qui en font exprès de ne pas jouer fort pour t'embêter. Rhôôô… Voilà, ça ira comme langue de p… ? (Surtout, amis lecteurs, considérez le deuxième degré auquel on oblige mes malheureux neurones!)
Trève de plaisanteries et fin de l'épisode comique. Il incombait à Christophe Marquilly, venu cette fois accompagné de deux excellents complices (Sam Baucourt à la basse et Freddy Holleville à la batterie), différents de ceux ayant opéré en 2008, la tâche très difficile de démarrer l'affiche "in" à une heure où une partie du public cherche où et comment se restaurer. Doit-on encore souligner la qualité de ses compositions, celles de son dernier album n'y dérogeant pas?
La qualité constante de ses prestations scéniques (ainsi que de ses complices)?
Le bonhomme a toujours la flamme sur scène et livre à chaque fois une prestation enthousiasmante. Pas d'exception à Charmont, avec même l'heureuse surprise d'un formidable
"I Thank You" façon ZZ Top, histoire de bien mettre les pendules à l'heure.
Bref, Marquilly, irréprochable, nous a sorti de son chapeau un parfait show à la Marquilly, comportant plus de titres de sa carrière solo que de Stocks, ce qui paraît bien normal en 2010 mais a peut-être un peu dérouté le public, qui avait eu droit en 2008 à plus de titres de Stocks. Cette attente a failli créer une incompréhension au point où l'assemblée a paru surprise, comme sonnée par la fin du set (déjà?), et a "oublié" (quel dommage!) de rappeler l'artiste! Enorme étonnement… Judicieusement renvoyé quand même sur scène par l'organisation, Christophe Marquilly nous délivra un rappel d'enfer propre à réveiller le public, qui du coup se déchaîna pour réclamer un deuxième rappel. Un vrai triomphe cette fois, parfaitement mérité pour une des grandes figures du blues-rock français. Un peu tard! Rien ne sert d'applaudir… Natchez reprenait le flambeau à l'extérieur, horaires obligent. En tous cas, l'étrange incident avait lancé la soirée, et le public, un peu confus de sa méprise?, avait pris la température des braises du stand de merguez. Encore merci Monsieur Marquilly!
Après le classique intermède "unplugged", Jesus Volt n'allait pas faire retomber la température! Pas question! Là encore, ça a envoyé du bois, sans se départir d'une certaine finesse, n'est-ce pas M.Tao? Les habitués de Charmont retrouvaient une ambiance très 70's avec un rock haute énergie, puissant et teinté d'une touche de psychédélisme, servi impeccablement par un groupe fonceur, remuant, décidé et en pleine forme. Une sacrée prestation menée sur un train d'enfer pour tous ceux qui avaient besoin de mettre un peu les doigts dans la prise! Difficile d'isoler un musicien de ce pack de qualité branché sur une intense énergie très "australienne", ce qui explique peut-être pourquoi le producteur Tony Cohen s'est occupé de leur cas. Par contre,
ceux qui pensaient trouver du blues avec ce groupe en seront pour leurs frais : si il est visiblement présent dans les racines des musiciens, en revanche le répertoire joué à Charmont s'est révélé définitivement rock, et pas qu'un peu! A voir le quatuor allumer la scène, on comprenait rapidement pourquoi leur album live est si bon.
Du coup, pendant que Natchez nous ravissait des esgourdes encore remplies de la fureur de
Jesus Volt, on se disait que Plug'n Play, malgré l'excellent album qu'il venait de sortir, allait devoir mettre la barre très haut pour ne pas affaiblir l'affiche. Et bien pari tenu! Le style du groupe, bien sûr très différent de Jesus Volt, n'en possède pas moins toutes les qualités pour délivrer un formidable impact. Ce groupe étonnant et original progresse d'année en année et,
est-ce l'influence amicale de Natchez?, leur travail impressionnant (allez écouter l'album, pour voir!) se voit récompensé par un remarquable set : prestation très professionnelle et mise en place impeccable, morceaux ambitieux… Un vrai bonheur! La présence charismatique à la basse
de Fred Guillemet, bien connu à Charmont depuis sa visite avec GL Band, renforce encore l'impact scénique. Certes, on perd du coup les chœurs remarquables de Jean-Philippe, l'ancien bassiste,
à qui Fred R., le chanteur du groupe a tenu à dédier un morceau, geste délicat et opportun,
mais on ne peut pas tout avoir. Alan et Christophe fournissent déjà un apport appréciable pour les choeurs. De plus, le remuant Fred G., impressionnant avec son énorme Thunderbird, pousse visiblement ses partenaires à se "lâcher" encore plus sur scène et leur apporte toute son expérience et son énergie intacte. Et puis, les nouveaux morceaux sur scène, mama mia, quelle claque! Alan et Christophe ont désormais visiblement trouvé la bonne recette pour leurs guitares et l'intégration de Fred R. au chant s'est affirmée depuis son retour de l'an dernier. Hommage
à Julien Boisseau, le bassiste de Jesus Volt qui a pris aussi une part dans l'enregistrement de l'album : il a pu jouer un morceau avec le groupe pendant que Fred G. s'octroyait un break,
un peu avant la fin du set. Mission remplie avec les honneurs et dans la bonne humeur, et,
au retour de Fred G., le groupe a pu boucler sa set-liste avec la même énergie.
Le gros succès du groupe auprès de son public reflétait la qualité de la prestation.
Pas de problème, j'avais bien fait de venir!
Last but not least : il revenait à Vdelli, le groupe, de clore le Festival. Je vous avais déjà parlé
en bien du leader, ce guitariste australien très doué, à l'occasion de la sortie du dernier album de son groupe éponyme, et il n'a pas failli à sa réputation pour sa seule date en France. Là, les amateurs de blues ont pu s'en mettre plein les oreilles, avec de nombreux classiques revisités avec goût par Michael Vdelli, colosse à la voix puissante et bien timbrée, au jeu de guitare impressionnant d'énergie (le maître-mot cette année?) et de sensibilité, et à la gentillesse et à la simplicité désarmantes. Nous tapons là encore dans du très haut niveau. Bon, pour reprendre un peu ce que j'avais dit dans la chronique du CD, le répertoire très classique joué ce soir-là ("Dust My Broom", "The Thrill Is Gone", etc…) se voit heureusement servi par une interprétation de haute facture, mais, est-ce la présence d'un bassiste (Kenji Kitahara) en principe seulement présent pour la tournée européenne?, le groupe s'est peu dirigé hors des sentiers battus et quelquefois rebattus. Ce sera là le seul bémol à la prestation du trio. Avec un répertoire un peu plus aventureux (et l'album montre que Michael Vdelli et Ric Whittle en sont parfaitement capables), nos lascars pourraient jouer dans la catégorie d'un Joe Bonamassa, c'est dire! Vdelli mérite à coup sûr d'être plus connu dans nos contrées par les amateurs du genre. Nul doute que ceux qui ont eu le privilège d'assister à sa prestation à Charmont sauront faire sa renommée. Vraiment, les organisateurs de Charmont nous ont encore gâtés cette année, que vont-ils bien pouvoir sortir de leur chapeau l'an prochain?
Finalement, j'ai l'heureuse impression de me répéter quand je parle (en bien!) de ce Festival, malgré chaque année quelques inévitables petits impondérables : programmation de qualité, réjouissante pour nous rassurer sur le haut niveau du rock et blues-rock français, organisation excellente, ambiance agréable, taille humaine et convivialité assurée, artistes accessibles, habitués sympathiques, petite exposition de bagnoles américaines de collection et superbes motos. On devrait avoir de telles réjouissances partout en France et tout au long de l'année!
Les majors en mangeraient leurs chapeaux! Les absents volontaires ont eu tort, une fois de plus, et ceux qui étaient dans l'impossibilité de venir ou de trouver un hébergement (ce même week-end, Troyes regorgeait de manifestations "concurrentes" ponctuelles et diverses, en particulier sportives, et tous les hébergements à plusieurs dizaines de kilomètres à la ronde affichaient complet de manière très inhabituelle, c'est dommage) vont se mordre les doigts en regrettant leur malchance. Attention, avec de telles qualités, la salle, bien remplie cette année encore malgré un évènementiel local bien fourni, risque un jour d'être trop petite…
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